Abces sous-phrenique d'origine appendiculaire
St. Balcou, C. Axente
Lucrarea a fost comunicatã la Societatea de Chirurgie din Bucuresti în sedinta din 21 aprilie 1937
Revista de Chirurgie 1938, nr.1-2, pag.71-79
Le 30 Juillet 1935, à 5 h. de l'après-midi, l'enfant P.B., agée de 15 ans, se présente à l'Institut de Chirurgie Roi Ch. II (Directeur Tr. Nasta), avec des phénomènes péritonéaux aigüs et dans un état extrêmement grave.
Antécédents hérédo-collatéraux: sans importance.
Antécédents personnels: à 4 ans double pneumonie, à 6 ans scarlatine, à 7 ans diphtérie et rougéole.
Passé physiologique: menstruée à 14 ans, durée de 4 jours, sans douleurs.
Maladie actuelle
Un an avant d'entrer à l'hôpital, elle a eu une crise d'appendicite aigüe avec plastron, qui s'est calmée grâce à un traitement médical. A la suite de cette crise, elle présentait des phénomènes d'appendicite chro-nique sans gravité. Le médecin qui l'avait soignée lui a conseillé de se faire opérer, mais la malade n'a pas suivi le conseil.
Huit jours avant d'entrer à l'hôpital, la malade a été saisie d'une vive douleur dans la moitié droite de l'abdomen, environ 4 h. après le repas du soire. On lui a appliqué des poches de glace, une diète hydrique et dans les prémiers trois jours, les phénomènes morbides se sont amendés, en grande partie. Le médecin a
qualifié la crise comme une "indigestion alimentaire" et il a recommandé, quatre jours après le début de la maladie, une purge huileuse drastique. Quelques heures après avoir ingéré la purge, la malade ressent une douleur violente dans le flanc droit, pareille à un coup de poignard. Les jours suivants, la douleur persiste avec
la même intensité, accompagnée de dyspnée, de
météorisme intestinal et d'une état général grave. On lui fait des injections opiacées, on lui donne une
médication symptomatique, mais les phénomènes morbides continuent de s'accentuer, de sorte que la famille est obligée d'interner l'enfant, le 8-ème jours après le début de la maladie.
Etat présent
La malade est robuste. La fièvre est à 40°, le faciès péritonéal, pâle, les yeux cernés, enfoncés dans les orbites, le regard effacé. L'abdomen est distendu en entier (sous l'influence des opiacés); au palper, des vives douleurs dans le flanc droit avec défense musculaire, hyperesthésie cutanée. Etat général: pouls à 140,
oligurie, agitation.
Diagnostic
Appendicite aigüe avec perforation appendiculaire. Indication opératoire d'urgence. Nous intervenons sous rachianésthèsie à la novocaïne, 10 ctg. Incision Edebohls. Nous pénétrons dans la cavité péritonéal dans la quelle nous trouvons un peu de liquide citrin, les anses intestinales distendues. Le coecum et le colon ascendant, fixés à la paroi, l'espace pariéto-colique droit effacé par adhérences péritonéales. L'appendice est coudé; il va vers le haut, on n'observe que sa base. Nous nous rendons compte qu'il s'agit d'un appendice latéro-coeco-colique ascendant au centre d'une collection purulente. Nous isolons à l'aide de mèches la
cavité péritonéale et nous décollons les adhérences entre le côlon et le péritoine pariétal avec les ciseaux courbes. Nous tombons sur une collection purulente malodorante, environ 100 ml. de pus dans lequel se trouve un calcul stercoral de la grosseur d'un noyau d'olive. Nous absorbons tout le pus et nous voyons apparaïtre l'appendice qui a une longueur d'environ 10 cm. ; il est adjacent au côlon, distendu par le pus, avec la paroi gangrenée, le méso extrêmement court (2-3 mm). On extirpe l'appendice, on enfouit le moignon, on stérilise la cavité de l'abcès avec de l'éther iodé, on draine largement avec des mêches et un tube de caoutchouc.
Post-opératoire on applique un traitement tonic général. Le pouls arrive à 84 le 8-ème jour après l'opération, la température ne dépasse pas 37°,4 -
l'abdomen est souple, les selles sont spontanées. Mais après cette évolution favorable, la malade se sent mal, elle ressent une douleur dans l'hypochondre droit, elle respire très difficilement, elle tousse; la fièvre monte à 38º, le pouls à 96. Nous changeons le pansement et nous ne trouvons rien de particulier du côté de
l'abdomen. A la base de l'hémithorax droit on constate une sous-matité, des frottements pleuraux umides et une atélectasie pulmonaire basale droite. Nous soupçonnons une pleurésie droite en voie d'évolution et nous traitons la malade par conséquence. Le traitement appliqué ne modifie pas l'état de la maladie. Les phénomènes pleuro-pulmonaire ne s'aggravent pas, mais l'état général s'aggrave et le 15-ème jour après l'opération, la fièvre monte à 39º,5 , le pouls est à 130, la leucocytose 14.000 avec 92% polynucléaires. Cet état indique la présence d'une collection purulente en dehors de la cavité péritonéale. A cette date, nous observons à la base droite, au niveau de la X-XI-ème côte sur la ligne scapulaire, une sonorité suspendue qui nous paraît suspecte; au dessus et au dessous de la sonorité, il y a matité. Nous pensons à une poche pyo-gazeuse. Nous allons nous même avec la malade à la radiologie et nous constatons dans l'hypochondre droit une poche d'air au-dessus d'un niveau de liquide situé entre la IX-ème et la X-ème côte, à droite, pas loin de la colonne vertébrale. On constate sur le film radio que la poche pyo-gazeuse est situé loin du foyer purulent intra-péritonéal drainé avec un tube de caoutchouc (fig.1).
Nous posons le diagnostic d'abcès sous-phrénique en arrière de la face postérieure du foie. Nous décidons d'intervenir et nous exécutons l'opération 17 jours après la première. Rachianesthésie avec 6 ctg. de novocaïne. Avant de commencer l'opération, nous faisons la ponction du foyer purulent sur la ligne scapulaire dans le X-ème espace intercostal et nous mettons en évidence les trois signes: celui de Scheurlein, celui de Pfühl et le signe de Fürbringer, qui confirment encore une fois la topographie sous-diaphragmatique de l'abcès.
Nous réséquons 4 cm. de la XI-ème côte et nous décollons le cul-de-sac pleural en haut. Au cours de cette manoeuvre on perfore la plèvre, à cause des adhérences, mais on protège la cavité pleurale en haut et on pénètre le diaphragme avec des ciseaux courbes. En ce moment on trouve dans la plaie du pus
malodorant et des gaz. En explorant avec le doigt, on trouve les parois de l'abcès bien délimitées (fig. 2,
fig. 3); on draine. Le 21-ème jour la malade quitte l'hôpital et le 35-ème elle est complètement guérie. Pendant tout le temps de plaie ouverte, quoique la plèvre fût ouverte, nous n'avons pas observé aucun phénomène pleuro-pulmonaire surajouté.
Nous avons présenté ce cas pour mettre en évidence deux points importants: 1. La pathogénie du processus purulent sous-phrénique; 2. Le diagnostic et la thérapeutique de l'abcès sous-phrénique.
1. La pathogénie du processus purulent sous-phrénique. L'abcès développé anatomiquement entre la face postérieure du foie et le diaphragme est une lymphangite suppurée. Les germes ont pu pénétrer dans le réseau lymphatique ayant comme source l'appendice. Le foyer d'infection primaire a été donc l'appendice, après quoi on a vu apparaître la péritonite loccalisée péri-appendiculaire et tardivement l'abcès sous-phrénique (fig. 4). Le réseau
lymphatique sous-péritonéal, formé de voies lymphatique de premier ordre, de collecteurs et de ganglions lymphatiques, est un système communiquant. C'est dans ce réseau que se déverse la lymphe du péritoine viscéral et pariétal, ainsi que du grand épiploon, du mésentère, ligaments, etc. Le péritoine est considéré par Pribram comme un vaste sac lymphatique, par les
stomates duquel sont absorbés les liquides ou les agents pathogènes dans les états morbides. Le grand épiploon, plongé dans une solution de carmin, absorbe les granules de carmin qui se trouvent dans la citerne de Pecquet (1). Une étude d'ensemble sur cette question a été entreprise par Winkler de Breslau (2). La lymphangite suppurée peut apparaître à des intervalles de temps variés en rapport avec la suppuration du foyer primaire, d'autres fois même, suivant Pribram, le foyer primaire présente une suppuration extrêmement réduite, il guérit,-et le foyer secondaire de lymphangite éclate. Cette
inégalité de réaction tissulaire par rapport à
l'agent pathogène, est appelée par Pribram "Differenten Immunität".
2. Le diagnostic et la thérapeutique de l'abcès sous-phrénique.
Dans l'abcès sous-phrénique rétro-hépatique, nous ne rencontrerons jamais des symptômes péritonéaux, mais fréquemment des symptômes pleuro-pulmonaires et des symptômes généraux. Devant le tableau clinique nous avons soupçonné la présence de l'abcès sous-phrénique avant tout examen para-clinique.
L'examen radiologique est un moyen de premier ordre pour préciser le diagnostic. L'examen du sang confirme l'état séptique du malade.
Quant à la thérapie elle est chirurgicale.Nous avons choisi une voie transpleurale de drainage avec un bon résultat et sans aucun signe d'infection de la cavité pleurale.
Bibliographie
1. Casparis, H. - Limphatis of the omentum. Anat. Record. , 1918, pag. 93-99.
2. Winkler, F. - Limphgefässe. Erg. der Alg. Path. Anat. des Man und der Tiere, 1934, 28:1.